Archive d’étiquettes pour : secteur en mutation

Fragilisé par la crise sanitaire de Covid-19, le secteur de l’hôtellerie se mobilise pour faire revenir les clients dans les établissements. Certaines tendances déjà à l’œuvre dans ce secteur se confirment. Parmi elles, le développement d’une offre plus responsable.

Secteur à l’empreinte carbone élevée, le tourisme s’adapte depuis plusieurs années aux problématiques éco-responsables pour maintenir son attractivité auprès du public. Ce dernier se révèle désormais prêt à payer plus cher pour un séjour touristique vertueux. Les divers segments du marché touristique – les transports, l’hébergement, les activités ou encore la restauration – sont confrontés à la nécessité de concilier leur activité historique, parfois polluante, avec l’émergence des enjeux écologiques.
Cette transformation s’avère indispensable notamment pour les acteurs traditionnels de l’hébergement, dont le marché est bousculé par l’arrivée de solutions alternatives. Pour eux, l’enjeu est avant tout de continuer à séduire les touristes. Cette tendance à proposer une offre plus éco-responsable représente aussi un des leviers de relance pour ce secteur fortement affecté par la crise de Covid-19.
Dans cette course à la transition “verte”, les grands hébergeurs s’inspirent des axes créatifs suivis par les acteurs indépendants.

Best Western chasse le plastique de ses établissements

À Paris, l’hôtel quatre étoiles Best Western Premier Opéra Liège collabore avec Racing for the oceans. La mission principale de cette start-up est d’aider les acteurs du tourisme à réduire leur consommation de plastique. Grâce à ce partenariat, l’hôtel ambitionne de devenir le premier hôtel zéro plastique à usage unique en France. L’établissement déploie déjà des alternatives éco-responsables pour éliminer progressivement le plastique de ses chambres. Ainsi, les dentifrices se présentent sous forme de pastilles, les shampoings et les savons sont solides et sans emballage, les cartes magnétiques d’accès aux chambres sont conçues en bois et les sacs-poubelles en tissu végétal. Avec plus de 15 000 nuitées par an, l’hôtel Best Western pourrait devenir une source d’inspiration voire un modèle reproductible pour d’autres établissements hôteliers accueillant un grand flux de visiteurs.

Signature Saint-Germain prend à bras-le-corps la lutte contre le gaspillage

Parmi les partenariats conclus entre des hoteliers et des organismes spécialisés dans les pratiques vertueuses pour l’environnement, l’hôtel trois étoiles parisien Signature Saint-Germain s’est associé aux Hôtels Solidaires. Spécialisée dans la collecte des restes des buffets des petits déjeuners dans les hôtels, cette association redistribue les denrées à l’Armée du Salut. Delphine Prigent, directrice de l’hôtel, affirmait en novembre 2019 que Signature Saint-Germain avait été « le premier hôtel à signer une charte avec eux ». La dirigeante ajoute que l’association collecte « les viennoiseries restantes, les produits d’accueil des chambres qui sont ensuite reconditionnés, et les rouleaux de papier toilette ». Ces produits sont ensuite distribués aux centres de sans-abri, précise-t-elle.

Louvre Hotels mise sur les composts pour recycler ses déchets

En 2018, le groupe Louvre Hotels établissait un partenariat expérimental avec la société Moulinot Compost & Biogaz. L’accord concerne la récupération des biodéchets produits par les établissements du groupe. La société prestataire se charge de former le personnel aux pratiques de tri ainsi que d’aménager les hôtels avec le matériel de collecte adéquat et sa signalétique. Le groupe Louvre Hotels charge également la société Moulinot de récupérer les biodéchets dans l’optique de les valoriser à l’aide de prestations de méthanisation et compostage des rejets des hôtels. Les déchets sont traités à moins de 50 km des points de collecte. Le partenariat entre le groupe hôtelier et la société Moulinot profite aux acteurs locaux, puisque le compost se destine à enrichir les terres des exploitants agricoles de la zone d’activité de l’hôtel. Début 2020, sept établissements du groupe profitaient de ce partenariat, atteignant 116 tonnes de biodéchets traités écologiquement au cours de l’année 2019. Au vu des retours positifs émanant aussi bien des employés du groupe que des clients, Louvre Hotels entend déployer cette pratique de valorisation de ses déchets à l’ensemble de son groupe;

À PROPOS DU TOURISME DURABLE

Avec 8 % du total mondial des émissions de gaz à effet de serre à son actif, l’industrie touristique doit se transformer pour répondre aux préoccupations environnementales croissantes. En France, premier pays d’accueil avec 89 millions de visiteurs internationaux en 2018, l’heure n’est plus à la prise de conscience mais à la transition écologique et éthique du tourisme.
Plus qu’une contrainte, cet enjeu est synonyme d’opportunités d’affaires et de levier de reprise suite à la crise de Covid-19 .
Transporteurs, hébergeurs et voyagistes s’adaptent et actionnent progressivement les leviers qui leur permettront de verdir leurs pratiques afin de conserver leur place privilégiée sur le marché. Face à eux, les nouveaux spécialistes mettent en avant leurs modèles disruptifs créés pour répondre aux nouvelles attentes des touristes.
Alors que les effets négatifs du surtourisme sont de plus en plus pointés du doigt, il convient de proposer des prestations qui permettront aux voyageurs de visiter le monde et les territoires en étant plus respectueux des habitants, des lieux et de l’environnement, sans pour autant rogner sur leur confort. Ceux qui parviendront à se différencier par leur exemplarité, tout en promettant une expérience hors du commun, l’emporteront.

L’offre bio dynamise le marché du babyfood en France. Mais plus que la certification AB, les parents sont en quête de produits originaux aux apports nutritifs augmentés. Le local, la tendance du « sans » et le végétal séduisent de plus en plus. Les entreprises l’ont bien compris et multiplient les lancements de nouveaux produits.

« La nutrition infantile est un marché de l’offre : le choix et la variété dopent les ventes »
_ Mickaël Aubertin, cofondateur de la start-up Good Goût

Les stratégies de différenciation des start-ups Good Goût et Yooji

Pour convaincre des parents toujours plus exigeants, les entreprises s’engagent dans des stratégies de différenciation. Illustration avec les start-up Good Goût et Yooji.

L’ultra-premium de Good Goût.

L’entreprise cible une clientèle urbaine à fort pouvoir d’achat en proposant des produits ultra-premium. Avec 70 références environ, les produits Good Goût se vendent jusqu’à 50 % plus chers que les petits pots conventionnels. Pour justifier ce différentiel de prix, la marque cultive deux singularités :
– une image de qualité, offrant une nourriture bio ayant bon goût ;
– la praticité de ses produits.
Ce positionnement lui permet de souffrir moins directement de la concurrence des nouveaux entrants.

« Avec l’arrivée des marques de distributeurs sur ce créneau, cocher la case bio ne sera bientôt plus suffisant : il faudra développer d’autres arguments pour se différencier »
_Sophie Rousset, chef de groupe chez Iri

Chez Good Goût, les lancements de produits sont nombreux. Pionnière de la gourde, la start-up propose depuis le printemps 2019 des brassés aux laits végétaux, qui rencontrent un franc succès. Outre ses nouveaux produits, Good Goût investit aussi de nouveaux segments. Dès 2018, la start-up  élargissait son activité avec une nouvelle gamme Kidz pour les 3-12 ans. Plus récemment, elle s’est positionnée sur les assiettes infantiles sous sa marque Le Petit Plat. Celle-ci comporte 4 références destinées aux plus de 12 mois, reconnaissables à leurs emballages colorés. Depuis peu, Good Goût propose également des laits infantiles bio 2e et 3e âge. La formulation de sa poudre de lait ne contient pas d’huile de palme et est élaborée à partir de lait entier, produit et transformé en France. De plus, la recette respecte déjà la réglementation qui entrera en vigueur en 2020 sur la teneur en DHA, un acide gras poly-insaturé oméga-3 essentiel au développement cognitif du cerveau du nourrisson.
Fondée en 2010 par Alexandra Butruille et Mikaël Aubertin, l’entreprise est rachetée en septembre 2018 par le groupe chinois H&H, spécialiste de la nutrition infantile et des probiotiques.

Les surgelés pour bébés de Yooji.

Fondée en 2012 à Pessac en Nouvelle Aquitaine, l’entreprise Yooji est la seule entreprise en 2019 à occuper le créneau des surgelés pour bébés. Son expertise a attiré les investisseurs : Danone est entré au capital de l’entreprise en 2017 à hauteur de 50 %. En 2018, la start-up innove en proposant une offre sucrée, en plus de son offre salée historique. Avec 25 références, les surgelés de Yooji se présentent sous la forme de galets dans des emballages refermables. Pratique, ce format permet aux parents de sélectionner la quantité voulue pour le repas de leur enfant et de composer eux-mêmes le menu, tout en évitant le gaspillage. Yooji se distingue en effet en matière de responsabilité. Elle est d’ailleurs labellisée PME+ (Pour un Monde + Engagé) :

  • La start-up s’inscrit dans une démarche de promotion de l’agriculture biologique avec ses légumes, ses viandes et ses fruits cultivés en France, sans produit chimique de synthèse et sans OGM.
  • Elle travaille avec des éleveurs soucieux du respect du bien-être des animaux et qui limitent l’utilisation des antibiotiques. De nombreux engagements RSE (responsabilité sociétale des entreprises) ont été mis en place par la marque depuis sa création et contribuent à sensibiliser les consommateurs.

À PROPOS DU MARCHÉ DE L’ALIMENTATION INFANTILE

Pénalisées par la crise économique de 2008 et le recul des naissances, les ventes d’alimentation infantile déclinent en France depuis plusieurs années. L’affaire du lait contaminé à la salmonelle de Lactalis, survenue en fin d’année 2017, a fragilisé encore plus le marché et cristallisé les craintes des jeunes parents autour de la qualité et de la sécurité des produits. Le développement de l’offre bio a permis de les apaiser, répondant à leur besoin de réassurance. Les laits et produits de diversification alimentaire certifiés AB (agriculture biologique) enregistrent des croissances à deux chiffres et font l’objet de toutes les attentions de la part des marques spécialistes mais également des leaders du conventionnel, arrivés tardivement sur la catégorie.
Cependant, alors que le bio semble déjà sur la voie de la banalisation, cette seule promesse ne suffit plus pour convaincre les parents. Le défi pour les acteurs consiste désormais à trouver les voies de spécification qui feront la différence.
Si l’innovation apparaît comme un moteur pour la nutrition infantile, il appartient aux acteurs du marché de faire connaître leurs produits mais également de développer une relation de confiance avec les consommateurs. Cela passe par une communication de proximité et une montée en qualité de l’offre, des procédés de fabrication et des modèles économiques. L’enjeu est de répondre à la demande de transparence des parents consommateurs et de leur proposer une expérience inédite pour les séduire et les fidéliser, dans un environnement concurrentiel accru.

L’environnement : le principal moteur du marché de l’emballage

Au cours des dernières décennies, la politique environnementale du gouvernement a contraint le secteur à faire évoluer ses pratiques et ses produits. Les plastiques, et les emballages ménagers qui les contiennent, sont particulièrement pointés du doigt. En outre, l’économie circulaire est “au coeur des préoccupations de l’offre et de la demande”, comme l’évoque Henri Saporta, journaliste d’Emballages magazine. Avec 90 % du plastique produit grâce aux matières premières fossiles, notamment le pétrole, la prise en compte de l’aspect environnemental devient ainsi une urgence pour l’industrie de l’emballage.
Les voies pour proposer un emballage plus vertueux sont multiples : développement de produits mono-matériaux, production d’emballages réutilisables, rechargeables, ou allégés en matière première, fabrication d’emballages biosourcés et/ou bio­dégradables. Cette dernière constitue notamment une solution très prometteuse.

Développer des emballages biosourcés et/ou biodégradables

Les matériaux biosourcés prennent une part croissante dans les emballages. Il s’agit de “matières d’origines biologiques, qu’elles soient végétales, animales, résiduelles ou algales” selon la définition apportée par le site Enzynov. Des entreprises jeunes ou plus anciennes innovent dans ce domaine. En voici quelques exemples.
Apifilm. Cette start-up française a mis sur le marché des toiles enduites d’un mélange de cire d’abeille et d’huile naturelle pour remplacer les films plastiques alimentaires, à l’intention du grand public. Ses produits sont réutilisables. Fondée en 2017, l’entreprise était déjà rentable en 2019 selon L’Express, grâce à ses 10 000 m² d’emballages vendus sur son site Internet et auprès de 230 points de vente en France. Parmi ses distributeurs, nous pouvons citer les magasins Biocoop, le site de e-commerce bio Greenweez et les grands magasins des Galeries Lafayette.
Solia. Proposant depuis plus de vingt ans de nouveaux concepts de packaging et de vaisselle jetable, cette entreprise a développé en 2019 de nouvelles boîtes dédiées au snacking et à la vente à emporter premium. Elles sont conçues en bois et en papier cuisson sulfurisé.

Des partenariats avec les marques

Les emballages biosourcés permettent de répondre à la demande d’emballages durables de la part des consommateurs et des donneurs d’ordre. Aussi, les innovations se développent en partenariat avec les marques.
Le brasseur Carlsberg, a par exemple développé en association avec le fabricant d’emballages Ecoxpac une bouteille biosourcée, au Danemark. Pour cela, son choix s’est porté sur la fibre de bois. Nommé Green Fiber Bottle, ce nouveau produit est composé de matériaux dégradables ou bien biologiquement inertes comme la craie ou l’argile. La ligne de production devrait être opérationnelle en 2020.

Les designers appellent également à l’emploi de matières biosourcées telles que “l’alfa, les algues, le bambou et les sous-produits et déchets de l’agriculture” selon le livre blanc de Fabrice Peltier “L’emballage à l’aube de sa révolution”. Il convient surtout d’employer des “ressources d’origine naturelle renouvelables non utilisées pour la nutrition humaine et animale”.

Une alternative prometteuse aux plastiques

Les matériaux biosourcés représentent une alternative prometteuse aux plastiques.
La start-up française Eranova, par exemple, travaille sur la mise au point d’un procédé permettant de transformer les algues marines en biopolymères. Cette solution a pour avantage de ne pas employer de végétaux comestibles. Fondée en 2016, l’entreprise envisage son avenir avec optimisme. Lauréate 2017 du programme d’investissement d’avenir de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), elle a bénéficié de 1,03 million d’euros d’aides. Symphony Environnemental (spécialiste en technologie plastique responsable) a également acquis 8 % de son capital en mai 2018, apportant 4,8 millions d’euros à son programme de financement préindustriel.

De son côté, le fabricant français d’emballages en plastique Europlastiques, actif depuis une soixantaine d’années, conduit également des essais de fabrication à partir de matières biosourcées. L’entreprise a travaillé à la transformation de polyéthylène issu de la canne à sucre, d’acétate de cellulose et de divers PHA (polyhydroxyalcanoate). Si elle maîtrise la technique, Europlastiques déplore toutefois un prix deux fois supérieur à celui du polypropylène conventionnel, comme l’expliquait Olivier Popeler, son directeur commercial, auprès de RIA en novembre 2018. Outre le prix, les matériaux biosourcés possèdent également des failles d’un point de vue technique. “N’oublions pas que ces matières de substitution sont moins fluides et que l’épaisseur des parois des emballages biosourcés est proche du double de ce que nous faisons en standard, même avec un PE (polyéthylène) issu du végétal”, commentait le dirigeant.

Les entreprises positionnées dans le domaine des matériaux biosourcés tentent de développer leurs procédés et produits en respectant deux impératifs : “des fonctionnalités équivalentes et un prix compétitif”, explique Arnaud Jadoul, journaliste d’Emballages magazine. Parmi elles, figurent les entreprises françaises Vegeplast (à l’origine d’une barquette à base d’acide polylactique) et FDR emballages (film ETP en fibre cellulosique).

Bioplastique oui, mais aussi biodégradable !

Le terme “bio-plastique” est à employer avec précaution. Il est utilisé pour qualifier à la fois un matériau biosourcé et un matériau biodégradable. Or, un matériau biosourcé n’est pas toujours biodégradable… Et inversement, un matériau biodégradable n’est pas obligatoirement biosourcé. Cette caractéristique soulève deux problèmes : l’impact des matériaux en fin de vie sur l’environnement et leur coût. L’absence de filière de recyclage pour les résines alternatives se traduit ainsi par “des barèmes d’écotaxes très pénalisants”, commente Olivier Popeler, directeur commercial d’Europlastiques. À l’avenir, l’enjeu consistera à proposer des emballages aux matériaux biosourcés et biodégradables et/ou compostables. Les innovations proposées par Solia, Eranova ou Europlastiques par exemple, représentent à la fois des solutions biosourcées et biodégradables.

Chrystèle Reynier

Une étude réalisée par Chrystèle Reynier
chrystele.reynier@indexpresse.fr

L’habitant est devenu un atout et un argument touristique. Vivre comme un local, rencontrer les habitants, partager une expérience unique… Ces tendances de la demande touristique, qui ont fait le succès de la société américaine Airbnb, se répandent dans le secteur de la restauration.

Etude de cas : la table comme premier réseau social, avec la société VizEat et Eatwith

Parmi les sites mettant en relation des hôtes cuisiniers avec des touristes, la plateforme et application VizEat (devenue Eatwith) rencontre un réel succès. Créée en 2014, elle propose des expériences culinaires diverses : repas chez l’habitant et ateliers de cuisine. En 2017, elle comptait 20 000 hôtes et plus de 70 000 utilisateurs. Les hôtes de VizEat sont des amateurs passionnés de cuisine et de rencontres. Pour les recruter, la plateforme a eu recours à des campagnes sur Facebook à ses débuts. Aujourd’hui, c’est surtout grâce au bouche-à-oreille qu’elle accroît sa communauté. Elle anime son réseau en proposant des soirées permettant aux hôtes d’échanger et de donner des conseils aux nouveaux arrivés.
La plateforme s’appuie en partie sur une stratégie de partenariats pour assurer son développement. Elle a collaboré avec Airbnb, des organismes touristiques et Atout France (l’agence de développement touristique de la France), pour  promouvoir son offre de restauration.
Elle a profité d’une belle publicité lorsqu’Apple l’a classée parmi les trois meilleures applications de l’année 2016, lui donnant une extraordinaire visibilité.
Durant l’été 2017, la start-up parisienne a réalisé une opération gagnante en rachetant son concurrent américain EatWith.

“D’habitude c’est dans l’autre sens que les acquisitions se font. On est content que ce rachat vienne du pays de la gastronomie”
_ Jean-Michel Petit, le cofondateur de l’entreprise interrogé par Les Échos.

EatWith disposait d’une importante communauté d’hôtes dans une cinquantaine de pays. « C’était important de mettre en commun cette communauté. Et on voulait aussi bénéficier d’une équipe américaine qui soit capable de nous aider à nous développer sur le marché et étendre nos partenariats pour les touristes américains qui sont à la recherche d’expériences pendant leurs voyages », précise Jean-Michel Petit. Dans cette logique, l’acquéreur a ouvert un bureau à San Francisco.
Quelques mois seulement après cette opération, VizEat s’est emparé de Grub Club, site culinaire événementiel 100 % londonien. Ce dernier réunit 1 000 lieux originaux et improbables. L’entreprise avait racheté très tôt un autre acteur français du social dining, Cookening, et avait procédé à deux levées de fonds (en 2014 et 2016, de 1 et 3,8 millions d’euros auprès du fonds anglais Eurovestech notamment).
La jeune pousse française regroupe désormais l’ensemble de ses offres sous la marque Eatwith. Sa stratégie vise à conquérir le marché international et à proposer de nouvelles offres. Elle est présente dans plus de 130 pays avec son application mobile disponible en 6 langues.

Dans cette mouvance de la restauration collaborative, nous pouvons également citer les sites :
Mealsharing : recherche de locaux qui proposent un repas chez l’habitant. Au-delà de la destination, la recherche peut être affinée par type de repas (déjeuner, dîner, brunch, etc.) et par préférence alimentaire (vegan, sans gluten, etc.).
Withlocals : en plus de l’offre de repas chez l’habitant, la plateforme propose de réserver des activités proposées par les locaux. Les clients peuvent prolonger l’expérience culinaire avec un cours de cuisine, partir pour un tour guidé à vélo, s’initier à la peinture, etc.

A propos de la digitalisation de la restauration

L’usage du numérique s’impose dans les pratiques des Français en ce qui concerne la restauration. Ils choisissent leur restaurant sur Internet, ils ont recours aux services de livraison à domicile ou com­mandent leurs plats via des applications de click and collect. Leurs habitudes évoluent tout comme la relation qu’ils nouent avec leurs restaurants. Si la majorité des restaurateurs ont intégré cette nouvelle donne, tous les établissements ne sont pas entrés dans l’ère numérique de la même façon. Certains peinent à abandonner leur modèle traditionnel, alors que d’autres ont adopté la technologie naturellement.
Toutefois, face aux enjeux de la transformation digitale, les grandes chaînes comme les indépendants sont nombreux à investir dans de nouveaux services, des outils de gestion automatisés ou des équipe­ments digitaux innovants. En s’appuyant sur les nouvelles technologies et les possibilités offertes par l’exploitation des données, ils gagnent en visibilité, améliorent leur service client et dopent leur chiffre d’affaires.
Les start-up issues de la foodtech participent grandement à réinventer la restauration en imposant leurs business models disruptifs. Elles fluidifient le parcours client à chaque étape de la création de valeur, en amont et en aval, en cuisine et en salle, à la commande et en caisse. Avec à la clé, davantage de flexibilité tant pour les restaurateurs que pour les consommateurs et la promesse d’une qualité de restauration conservée.

Justine Carrel « Restauration et digital » est une étude réalisée par Justine Carrel

 

En France, comme à l’international, toutes les maisons de luxe déploient aujourd’hui une stratégie globalisée intégrant le numérique. Si le magasin s’avère toujours déterminant dans l’identité de la marque et son lien avec les clients, l’incursion du digital permet d’envisager de nouvelles possibilités propres à améliorer l’expérience client.

Pour les marques du luxe, et plus encore pour celles de l’ultra-luxe, la différenciation passe par l’expérience d’achat, au sein de laquelle le vendeur tient une place incontournable. Jusque-là, pour les clients, le vendeur était l’unique interlocuteur, avec qui une relation de proximité, voire d’exclusivité, se nouait. En 2019, numérique oblige, l’omnicanal s’installe comme la nouvelle norme de la distribution, y compris dans le luxe. Avec le luxe digital, il s’agit donc de conserver la proximité avec le client, voire de l’amplifier, en créant des synergies entre les circuits et en misant aussi sur la digitalisation des points de vente physiques.

Luxe digital : Proposer une expérience client innovante

Selon une étude PwC Strategy&, une marque de luxe répond aux besoins omnicanaux de ses clients lorsqu’elle s’appuie au moins sur cinq services-clés :

  • La disponibilité du produit en ligne et en magasin en temps réel,
  • La livraison à domicile et click and collect,
  • Le retour produit en magasin,
  • Le programme de fidélité intégré,
  • Le service après-vente en temps réel.

Mais il est indispensable de compléter cette offre de base par des services digitaux innovants tels que la personnalisation des produits à l’aide de l’intelligence artificielle, des chatbots pour converser avec les clients ou encore des essais de produits en réalité augmentée afin de mettre le point de vente au centre de l’expérience. Voici quelques exemples de stratégies opérées par des acteurs du secteur :

  • FDS (filiale dédiée à la distribution de produits de luxe dans les aéroports du groupe LVMH) a cherché à introduire le numérique en magasin par le prisme du jeu. Ainsi, fin 2017, les clients de sa boutique de Venise pouvaient gagner la possibilité de partir sans payer, si le code donné lors du passage en caisse et saisi sur leur téléphone était le bon. Ce dispositif digital original a permis d’engranger des informations sur les clients lors de l’identification, et en même temps de générer une hausse du panier moyen.
  • Fin 2018, en partenariat avec Apple, le groupe Kering a déployé des applications visant à améliorer les services et l’expérience client en boutique. L’une des applications offre la possibilité aux forces de vente d’accéder en temps réel aux stocks pour indiquer au client si telle taille ou telle couleur est bien disponible dans le magasin, ou alors si elle peut être commandée dans un autre.
  • L’enseigne multimarques londonienne Browns a choisi en octobre 2017 de créer un concept store à Londres. Baptisé Nomad, ce point de vente de 400 m2 accorde une large place aux nouvelles technologies, avec des miroirs digitaux interactifs, une densification des produits par RFID (radio-identification), des points de vente mobiles ou encore une “étagère infinie”, permettant de visualiser le stock complet des produits.
  • Le parfumeur de luxe Serge Lutens intègre la réalité virtuelle dans sa boutique parisienne. Une pièce a été spécialement mise en scène, sous la forme d’un boudoir tamisé et délicatement parfumé, disposant de casques Oculus. Le client peut ainsi voyager dans l’univers de la marque grâce au casque de réalité virtuelle. Il entre alors dans l’atmosphère personnelle du créateur, en le rejoignant dans son riad de Marrakech. Le but est de montrer les sources de la création de la marque et d’immerger les nouveaux “Lutensophiles” dans son univers.
  • Des pop-up smart stores pour Hermès. Pionnière sur le volet du digital, la maison Hermès mise depuis longtemps sur la complémentarité entre ses canaux historiques et digitaux. L’opération HermèsMatic, lancée en 2016, est emblématique de ce parti pris omnicanal.
    La démarche s’est déroulée en 3 étapes :

    • Des messages sur les réseaux sociaux informant de la création de laveries gratuites pour rajeunir les célèbres carrés de soie de la marque.
    • La mise en place de pop-up stores abritant des machines à laver aux couleurs de la marque.
    • Sur place, enfin, les propriétaires de foulards ont pu bénéficier d’un service gratuit de rafraîchissement (teinture, lavage, rinçage, assouplissement et séchage). Une fois rénovés, les foulards empaquetés ont été remis gratuitement à leurs détentrices.Hermès a ainsi été précurseur du phénomène des “pop-up smart stores”, identifiés comme l’une des tendances en provenance de Chine appelée à se développer en Europe. Ces “magasins éphémères ont pour ambition d’articuler vente en ligne et vente physique, tout en personnalisant l’expérience client. Dans ce type de boutiques, seul un échantillon représentatif de produits est entreposé. Pour avoir accès à davantage de tailles ou de coloris, les clients peuvent approcher un article équipé en puce RFID des cloud shelves (écrans interactifs donnant accès à la plateforme de vente en ligne). Ils pourront ensuite scanner le QR code d’un produit, de manière à l’acheter via leur téléphone portable et poursuivre leur shopping sans être encombré par leurs achats”, d’après les explications de Bertrand Jouvenot, fondateur du cabinet Brigades du Marketing et auteur d’une chronique, fin 2018, pour Harvard Business Review France.

Conserver les valeurs du luxe

Si la technologie devient l’instrument de l’enri­chissement de l’expérience et du service client (à destination notamment de la population des millennials), l’incursion des nou­veaux outils dans les modes de vente, de communication et de marketing ne doit pas se faire au détriment des valeurs du luxe et de ses clients.

Bien qu’adepte des nouvelles technologies, la jeune génération affiche en effet ses attentes en matière de transparence et d’authenticité. Les millennials recherchent la sincérité dans la communication des marques pour pouvoir adhé­rer à leurs univers et à leurs produits. Il s’agit dès lors pour les maisons de luxe de s’éloigner du traditionnel storytelling afin de proposer une communication plus directe et engageante. Par ailleurs, sur Internet comme en magasin, les marques doivent continuer à maîtriser la sélecti­vité de leurs ventes pour garder la main sur leur image et conserver une part de rareté.

Pour le luxe digital, l’enjeu est de préserver les bonnes recettes d’an­tan en les mêlant à la modernité des attentes des consommateurs d’aujourd’hui. La temporalité du luxe a été bousculée par l’instantanéité du web et des réseaux sociaux. Les marques doivent abso­lument recréer les fondations de leur modèle en cherchant à résoudre les nouvelles équations soumises par leurs clients, entre individualité et esprit de communauté, intensité et esprit décon­tracté, éthique et matérialisme.

 

Repères

Avec 27 milliards d’euros de chiffre d’affaires généré, la vente en ligne de produits de luxe dans le monde ne représente qu’une infime partie de l’ensemble du marché : les ventes globales ont atteint 1 200 milliards d’euros en 2018. Pourtant, fait significatif, ces ventes sur Internet ont pro­gressé de 22 % par rapport à 2017, selon le bilan annuel du cabinet de conseil Bain & Company. Avec un taux compris entre 7 et 8 %, la part du circuit de vente digital dans le marché français est équivalente à la moyenne mondiale. Les générations Y et Z apparaissent désormais comme la cible clientèle à potentiel pour l’uni­vers du luxe. En 2025, ces millennials totaliseront 55 % des ventes.

 

Luxe et digital. Stratégies pour créer de la valeur et se rapprocher des clients, sans renoncer à son identité.
Une étude rédigée par Nadine Bruel, en collaboration avec Justine Carrel