Dopé par le premier confinement, le e-commerce alimentaire cherche à pérenniser sa croissance et à fidéliser les clients nouvellement acquis

e-commerce alimentaire

7,4 millions d’acheteurs mensuels : le marché français de l’e-commerce alimentaire a connu une croissance inédite au printemps 2020, lors du confinement. Auparavant, la moitié de ces consommateurs n’avait jamais utilisé ce canal de vente pour des produits alimentaires.
La crise sanitaire a créé de nouveaux réflexes d’achat, jouant un rôle d’accélérateur pour une pratique déjà existante mais dont le plein potentiel ne s’est pas encore libéré.
Avec 80 % de parts de marché, la grande distribution s’arroge la première place en s’appuyant sur le format du drive, spécificité française à succès. Mais depuis quelques années, les acteurs composent avec une concurrence montante : de nouveaux intervenants investissent le commerce alimentaire en ligne et bousculent les acteurs historiques avec des business models novateurs. Le géant américain Amazon est la figure de proue de ce mouvement avec son service de livraison express Prime Now. Les start-up, la distribution spécialisée et les industriels de l’agroalimentaire suivent et tentent de prendre position.
Tous œuvrent pour répondre aux exigences croissantes des acheteurs, anciens ou nouvellement recrutés. Un enjeu de taille alors que la France entame un nouveau confinement.

Des alternatives à la livraison à domicile

En parallèle des expérimentations menées sur les modes de livraison innovants (véhicules autonomes, drones), les enseignes s’engagent dans le développement de solutions alternatives à la livraison à domicile. Certaines propositions permettent aux distributeurs de déléguer la livraison du dernier kilomètre, particulièrement onéreuse puisqu’elle constitue à elle seule 41 % du coût logistique des courses en ligne.
Plus généralement, les e-commerçants tendent de plus en plus à laisser le choix du mode de livraison au client selon l’urgence avec laquelle il souhaite recevoir le colis. Les distributeurs espèrent ainsi sortir du schéma de la livraison gratuite. Cette tendance se retrouve dans l’ensemble de l’e-commerce, où l’on observe une diversification des modes de livraison.

Consolider les modes de retrait existants

Du point de vue des distributeurs, le click & collect ou les points relais constituent des alternatives pertinentes à la livraison à domicile. Le click & collect représente 40 % du chiffre d’affaires de l’e-commerce alimentaire en France et tend à augmenter.
– Le retrait est assuré par le client
– Les vendeurs échappent à l’envoi à domicile
Ces deux modes de livraison sont bien installés en France, contrairement aux autres pays européens : 53 % des Français apprécient se faire livrer en relais contre 17 % pour l’ensemble des Européens.
Aux États-Unis, qui avaient misé intégralement sur la livraison à domicile, le click & collect progresse, passant de 18 % du chiffre d’affaires e-commerce en 2016 à 33 % au 1er semestre 2019*.
* Ventes en ligne des dix plus gros ‘retailers’ (Walmart, Target, Macy’s, Apple, Best Buy, Costco, Kohl’s, Nordstrom, Home Depot, Old Nacy).

Le dernier kilomètre représente 30 % environ du coût total d’une livraison. De ce fait, le click & collect est plus performant économiquement et il garantit aussi la satisfaction du client qui peut choisir son créneau de livraison”
Stéphane Tomczack, fondateur du salon de logistique Deliver.

Développer des solutions nouvelles 

Les drive piéton
Alimentés par des plateformes dédiées ou des hypermarchés en périphérie, ils permettent aux clients de récupérer leurs courses à pied dans les centres-villes des grandes agglomérations.
Ce système offre la promesse de pratiquer les prix des hyper marchés en centre-ville : les drives piétons affichent en effet des prix nettement inférieurs à ceux des magasins de proximité.
Adoptés par la plupart des grandes enseignes de distribution depuis 2016, les drive piétons ont gagné en notoriété lors du confinement du printemps 2020. Les points de retrait de Carrefour et d’E.Leclerc ont vu leurs ventes plus que doubler.
Avec 16 points de retrait, Carrefour représentait l’enseigne la plus pourvue en drives piétons fin 2018. Fin 2019, le distributeur a innové avec l’ouverture de deux drives piétons parisiens proposant parallèlement 800 références de produits de dépannage sur place.
E.Leclerc poursuit une stratégie analogue d’ouverture, qui permet à l’enseigne de s’implanter dans les grandes agglomérations dont elle était traditionnellement absente. Ce dernier en a inauguré un nouveau en 2019, proposant de nombreux services inédits : lockers Amazon, Relais Colis, conciergerie de clefs, stand de restauration à emporter avec des plats traiteur, sandwicherie, snacking, prêts d’équipements ménagers et mobiliers…

Les points de retrait mobiles
Les clients viennent chercher leurs courses à un endroit et un horaire définis, généralement sur un parking. Le Système U de Lyon en est l’inventeur. Pour cela, le distributeur a noué des partenariats avec des entreprises et des administrations. Environ 110 commandes sont retirées par ce biais chaque semaine sur le campus de l’Ecam, une école d’ingénieurs lyonnaise.

Les consignes réfrigérées
Les clients retirent leurs achats 24 h/24, même en dehors des heures d’ouverture de l’enseigne. Des casiers sont installés à l’intérieur ou à l’extérieur et dans des lieux très divers (au sein de quartiers résidentiels, à proximité de grandes entreprises ou de stations-service, sur le parcours domicile-travail, etc.).
E.Leclerc, Intermarché, Casino, Carrefour et Super U ont installé les casiers réfrigérés du groupe multinational français Epta, les #EPTABricks.

Déléguer la livraison : une option porteuse

Les enseignes alimentaires multiplient les partenariats afin de confier à d’autres entreprises ou plateformes Internet la prise en charge de la livraison du dernier kilomètre.

La livraison collaborative

La livraison collaborative prend ainsi de plus en plus d’ampleur. En mettant en relation des particuliers sur une plateformecette solution apparaît comme un créneau porteur tant pour les distriobuteurs que pour les consommateurs : 55 % d’entre eux se disent prêts à effectuer des livraisons aux habitants de leur quartier, révèle LSA.
Les deux leaders du secteur, Shopopop et Yper, ont vu leur activité exploser avec la crise sanitaire de 2020. Cela s’est concrétisé par la signature de nombreux contrats avec les distributeurs alimentaires.

“La promesse est alléchante [pour les enseignes] : les particuliers qui livrent leurs voisins le font pour une somme modique et le client final paie un peu plus, finançant quasiment tous les frais”,
Linéaires.

Alliance avec des plateformes de livraison

La crise de Covid-19 et le confinement ont œuvré au rapprochement entre les distributeurs alimentaires et les plateformes de livraison de repas.
– E.Leclerc a noué un partenariat avec Deliveroo en juin 2020 pour une dizaine de magasins.
– Carrefour s’est associé à Uber Eats pour les livraisons de courses à domicile en dehors de l’Île-de-France. — Casino est quant à lui associé à Deliveroo depuis avril 2020. Le distributeur souhaite, grâce à cette alliance, déployer un service de livraison express en 30 minutes dans toute la France. En 2021, 1 500 magasins de l’enseigne devraient être accessibles sur l’application Deliveroo.
L’alliance des plateformes de livraison et des distributeurs alimentaires s’avère stratégique pour les deux types d’acteurs :
– Pour les plateformes : diversification de l’offre au-delà de la restauration. La volonté de développer leur catalogue à l’aide de produits d’épicerie existait déjà avant la crise.
“Notre ambition est de proposer au plus grand nombre une livraison de repas et de produits du quotidien tout en apportant plus de revenus aux commerçants. La pandémie n’a fait que renforcer ces projets”, témoigne Bastien Pahus, directeur général d’Uber Eats France.
– Pour les distributeurs : désengorgement du canal de la livraison à domicile durant la crise.
“Pendant le confinement, ces partenariats ont permis aux distributeurs de répondre à l’explosion de la demande de livraison à domicile, sans investir outre mesure”, informe LSA.
Plus stratégiquement, les enseignes considèrent ces partenariats comme un canal de vente supplémentaire pouvant capter une clientèle nouvelle. “L’appli Uber Eats, ce sont 9 millions de téléchargements. Nous touchons par ce canal un nouveau bassin d’audience, plus jeune, qui démontre une forte appétence pour les offres de prêt-à-manger”, rapporte Amélie Oudéa-Castéra, directrice exécutive transformation digitale, e-commerce et data de Carrefour.
Néanmoins, la question de la rentabilité de ce type d’opération se pose. Les distributeurs ne peuvent pas fixer librement leurs prix sur les plateformes et ils doivent réussir à amortir le coût de la livraison express. Cependant, contrairement aux consommateurs traditionnels, les clients des plateformes de livraison sont habitués à participer aux frais de livraison de repas. Dans ces conditions, la rentabilité de ce mode de délivrance tout comme son succès auprès des consommateurs restent toutefois encore à démontrer.

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